Interview de Ramon Reyntiens: Dendrologue Forestier actif à la société Royale Forestière
Interview de Ramon Reyntiens: Dendrologue Forestier actif à la société Royale Forestière
Monsieur Reyntiens est un passionné de l’arbre, Dendrologue Forestier, il visite, depuis les années 80, avec son épouse, les collections botaniques à travers le monde. Il en ramène de nouvelles essences qu’il teste en parcelles. Il développe ainsi des zones didactiques qui inspirent les propriétaires forestiers. Son objectif est de développer les forêts de demain, des forêts multi essences, aussi rentables que résistantes.
Il est interviewé par Thierry Delperdange (Libramont TV) à l’occasion de la Foire 2019. Ensemble, ils échangent sur l’avenir de la forêt et sur le thème “Qui construira nos villes de demain?”.
La forêt wallonne est malade
Mr Reyntiens rappelle que nos forêts sont malades. L’Epicéa et le Douglas sont attaqués, le Hêtre a soif, le Chêne subit des champignons. Après 2 années consécutives de canicules et de sècheresse, le constat est inquiétant.
Si Mr Reyntiens rappelle que la migration des barrières climatiques existe depuis des milliers d’années, il est inquiet par l’accélération du phénomène. Pour lui, on commence à voir les premiers effets du réchauffement climatique annoncé il y a 20-30 ans.
Les solutions pour ramener valeur et santé à nos forêts
En tant que Dendrologue Forestier, Mr Reyntiens étudie la science de l’arbre et cherche à apporter des solutions innovantes.
Depuis les années 80, il parcourt les arboretum avec son épouse et s’intéresse aux associations d’essences originales qui sont faites dans d’autres pays. Il y découvre des quantités d’espèces aussi belles qu’intéressantes pour nos forêts.
L’aventure a commencé en 1998 suite à un voyage d’étude dans le Sud France, l’Espagne et l’Italie où les essences doivent résister aux longues périodes sans pluie. Mr Reyntiens en a ramené le Cèdre de L’Atlas qu’il a mis en mélange avec le Cèdre de l’Himalaya. Ce dernier n’étant curieusement pas uniquement destiné au froid. Le mélange a donné des résultats très encourageants.
Fort de cette découverte, il a testé un croisement entre le Cyprès qui résiste à la chaleur et à la sécheresse sur les sols caillouteux et le Faux Cyprès qui, lui, résiste au froid. Il a obtenu une essence originale tout à fait surprenante au niveau forestier.
Depuis 1998, ce sont pas moins de 38 placettes didactiques qui ont été ainsi créées, un véritable parcours pédagogique qui est régulièrement visité par de nombreux propriétaires forestiers en quête de solutions.
Mr Reyntiens insiste sur l’importance de passer de la monoculture à des associations d’essences feuillues et résineuses afin de rendre nos forêts plus résistantes.
Des essences à haute valeur
Mr Reyntiens se rappelle de l’Orme des années 80 qui se vendait à plusieurs centaines d’euros. Aujourd’hui, les résineux plafonnent à 75-80 euros le m3.
Il est donc temps, pour lui, de cultiver des arbres à haute valeur de revente. En combinant des essences de bois nobles à cycles courts, moyens et longs, on arrive à faire de gros revenu de manière continue. Cela permet d’avoir les moyens financiers de planter chaque années ces essences diversifiées et d’investir dans toute une série de travaux d’entretien. On en arrive à une forêt jardinée à haute valeure ajoutée.
Cette démarche est soutenue notamment par la SOCOFOR, coopérative forestière, la Société Royale forestière et le NTF, syndicat de propriétaires forestiers.
Le travaille de Mr Reyntiens se poursuit grâce à des collaborations avec l’Université de Gembloux.
Construire en bois nos villes de demain
Pour Mr Reyntiens, la construction en bois est aussi l’avenir de nos villes. On arrive maintenant à construire des immeubles de 30 étages en bois. Ils sont particulièrement agréables à vivre car profitent d’une isolation naturelle. De plus, le bois fixe le CO2.
C’est aussi sur l’intérêt de la filière du mobilier en bois que Mr Reyntiens insiste. Il explique que les grandes chaînes françaises de mobiliers se plaignent d’avoir toujours les mêmes essences à se mettre sous la dent. Ils attendent des bois à textures et rendus différents pour se différencier et assouvir les besoins d’une clientèle toujours plus exigeante.
Atteindre une masse critique
Mr Reyntiens espère que de nombreux propriétaires forestiers vont lui emboîter le pas. Il rappelle que plus ils seront nombreux à implanter de nouvelles essences, plus vite la masse critique sera atteinte pour pousser les industriels à évoluer.
Nul doute que cette nouvelle façon de développer la forêt wallonne lui permettra de mieux résister aux changements climatiques tout en assurant un meilleur revenu pour nos forestiers.